dimanche 18 novembre 2012

DONNONS-NOUS LA MAIN.


Tout ne serait-il au pays qu’irritant ou inquiétant ? Pas du tout. Rien ne peut être totalement obscur aussi sombre fasse-t-il ! Changeons juste de temps en temps de point de vue, voulez-vous ? Pour ainsi dire, d’endroit ou de position d’où nous pouvons autrement apprécier la situation.

Jamais contexte récent n’a autant favorisé le questionnement sur l’essentiel. A preuve et à titre d’exemple, l’engouement des lecteurs de ce blog pour l’article traitant de la parenté à plaisanterie, "ZIVA, soubassement du fihavanana".

Malagasy ? Malgache ? C’est qui ? C’est quoi, pourquoi, comment, etc. Surtout au moment où, à table dans les chaudes chaumières, on s’inquiète du sort de ces « longo » d’un Sud lointain dont on aura à peine entendu parler jusqu’à aujourd’hui. Du coup, s’intéresse-t-on mieux à la géographie, à l’histoire, aux us et coutumes dont on se souciait peu auparavant.

Aussi, ai-je le plaisir de soumettre à votre attention ce texte d’un « Monsieur le professeur » qui a toujours su conquérir l’estime de ses étudiants. Pour la petite histoire, ce séduisant personnage s’est volontairement mis aujourd’hui au service d’un établissement secondaire en plein milieu rural. 

On ne s’étonnera de ce choix que si on ignore son parcours et sa vision des choses. Peut-être, certains d’entre vous vont-ils deviner son identité au fil de la lecture du texte ci-après ?

Je cite.

Que veut dire « héritage afro-austronésien » ?

(…)
Avant d’entrer dans notre sujet, je dirai d’abord que je n’aime pas le mot « syncrétisme ». C’est un mot qu’utilisent les Eglises chrétiennes pour condamner ces sauvages qui se sont convertis et qui, sans réfléchir, ont conservé des croyances païennes. Je préfère le mot « synthèse », parce que les hommes qui vivaient dans un autre espace social, avaient constaté les bénéfices qu'ils tiraient de leurs pratiques et n’avaient aucune raison de les abandonner, une fois qu'ils s’étaient dit qu'ils pouvaient tirer d’autres bénéfices de la nouvelle religion qui leur était proposée. Ne serait-ce même, s’agissant de Madagascar, que pour échapper aux sanctions qu’avait édictées Ranavalona ii. Les hommes avaient donc bien réfléchi et l’on ne peut parler de syncrétisme. Utiliser ce mot dépréciatif est une façon de condamner ceux qui l’auraient pratiqué.
On peut maintenant en venir à notre « afro-austronésien ». « Afro » évidemment renvoie à l’Afrique. Dans cette expression, Madagascar est renvoyée à une forme commune comprenant le continent africain et la Grande Ile. Il est vrai que, dans l’histoire géologique, dans la Pangée, premier et unique continent, les parties les plus anciennes de Madagascar étaient jointes à la partie qui forma l’Afrique. De même à l’époque du Gondwana. La cohabitation et la co-résidence ne lui plaisaient sans doute pas, puisque ce qui devint la Grande Ile se sépara, il y a 65 millions d’années, et se mit à voguer vers l’est. Le divorce ne fut pas homologué par les géographes puisqu'ils la désignèrent comme la grande île africaine. Il fut un temps où exista un ensemble politique : la Communauté Africaine et Malgache. Même dans cet ensemble, Madagascar se singularisait, mais son président de l’époque parlait de Madagascar comme d’un exemple parfait de communauté afro-asiatique.
Cette Asie, on lui donna une définition plus particulière et mouvante : malaise, indonésienne ou malayo-polynésienne. Malaise ? Les Malais existaient-ils au temps des premières migrations ? Personne ne peut le dire. Indonésienne ? Là, tout est bien clair ; l’Indonésie fut créée par les Hollandais au 19e siècle pour regrouper toutes les colonies qu'ils avaient en Insulinde dans la zone indo-pacifique, et le mot fut conservé au moment de l’Indépendance. Les Malgaches ne pouvaient pas venir d’une Indonésie qui n’existait pas, tout comme le Gaulois Vercingétorix ne peut être français. Malayo-polynésienne ? L’expression désigne une zone de langues apparentées, langues du monde malais et indonésien et langues polynésiennes du Pacifique. Mais, ainsi définie, cette zone exclut Mélanésie et Micronésie dont les langues sont bien apparentées au malais et au houaïlou.
Et le mot austronésien ? Désignant toutes les îles à l’est du continent asiatique, il désigne une généralité. Les anthropologues anglophones parlent du monde austronésien (austronesian) de même que les Allemands (austronesisch). Il n’y a que les Français, emberlificotés par leurs possessions coloniales qui aient tardé à l’admettre. Les universitaires indonésiens parlent du monde nousantarien ou « monde des îles » – mot que l’on peut aussi bien utiliser.
Alors que vient faire cet « afro-austronésien » ? On le sait depuis Gallieni, le monde colonial français voyait dans la population malgache des côtiers noirs définis comme bantous et des Hovas – c'est-à-dire Merina – et assimilés qui, basanés, venaient du monde malais. Sur ce paysage racialiste à phénotypes, était joué une partition social-darwiniste avec des Noirs inférieurs et des basanés à demi-civilisés mais supérieurs. C’est ce qui affligea les premiers et enorgueillit les seconds. C’est toujours ce qui afflige les premiers et continue à enorgueillir une partie des seconds.
L’autre partie de ces seconds a manifesté sa réaction en présentant la population malgache comme étant le résultat de multiples migrations venues d’horizons très divers. Tous les Malgaches y sont présentés comme une masse de métis dont les ancêtres venaient d’autres rivages. On aurait même trouvé des Japonais autrefois à Ambohitrimanjaka ! On a pu même en arriver à écrire, comme nous l’avons tous lu récemment que « Madagascar étant une île, elle a été peuplée par de multiples peuplades poussées sur nos rivages soit par « fortune de mer » soit par aventures commerciales. IL N’Y A DONC PAS DE PEUPLE MALGACHE ».
Je n’aime pas le mot « peuplade » caractéristique du vocabulaire colonial dépréciatif. Le mot évoque la pelade et, quand il était élève au lycée, donnait la chair de poule à feu Césaire Rabenoro. Qu’il y ait eu des « aventures commerciales », c’est bien évident, mais j’ai du mal à penser que des « fortunes de mer », ou si l’on veut être clair, des naufrages soient à l’origine d’une bonne partie du peuplement. Et démographiquement, que l’on puisse mettre sur le même plan, la masse de la population austronésienne qui s’installa progressivement entre le 8e siècle avant l’ère chrétienne et le 13e siècle de notre ère, et les quelques dizaines d’individus du monde arabo-musulman qui vinrent y faire du commerce. La mettre sur le même plan que les descendants des quelques Français qui avaient une compagne malgache dans la région de Fort-Dauphin et même la dizaine de milliers de Français de l’époque coloniale.
Ma conclusion est bien qu’il y a un peuple malgache qui a assimilé culturellement les immigrés qui sont venus s’installer à Madagascar.
Et l’on comprend que l’expression « afro-austronésien » soit une forme plus moderne que l’ancien « afro-asiatique », mais tout aussi faux scientifiquement. Le parti colonial malgache continue à inventer des mots pour maintenir les erreurs coloniales.

Jean-Pierre DOMENICHINI
Novembre 2012

Fin de citation.

Pourquoi avoir publié ces lignes dans ce blog ? Entre autres raisons, pour nous inciter à tendre la main à nos « longo » de ce Sud si lointain.

Pour ce faire, des chaînes de solidarité fonctionnent déjà quand d’autres sont encore en train de se concevoir. Participons de tout cœur. Et à quelque niveau que ce soit.

Momentanément, faisons fi des malsaines manipulations poliFiciennes et autres préoccupations trans-géo-méga-politico-économico-financières !

Tendons la main aux nôtres, à ces « longo » du Sud lointain et tous ceux qui se font silencieusement dépouiller partout ailleurs au pays !

DONNONS-NOUS LA MAIN.

KABOTSINTSINA à 4 feuilles foi, espoir, amour, chance-prospérité = ABONDANCE.



Aucun commentaire: